Aujourd’hui quand je parle de responsabilité collective, nous ressentons tout d’abord un frisson dans le dos. Des réflexes incontrôlables nous signalent en effet aussitôt que quelque chose comme la responsabilité collective ne peut plus exister aujourd’hui. En tant que société éclairée, nous avons tout de même dépassé les tragédies du Moyen Âge ! Des réflexes un peu plus contemporains nous rappellent alors, en guise d’avertissement, des scènes tragiques de responsabilité collective sous le national-socialisme des années trente ou quarante. Ou la responsabilité collective pratiquée par le gouvernement israélien avec ses punitions collectives des années quatre-vingt. Ou encore les purges spirituelles en Corée du Nord dans les années 50 sous Kim Il-Sung.

Alors, pourquoi devrions-nous nous inquiéter de la responsabilité collective ? Il est peut-être vrai qu’avec toutes les mesures de sécurité prises contre le néo-fascisme, un cas comme celui de Philipp Scheidemann ne pourrait pas se reproduire. Il est impensable qu’une Gestapo puisse un jour intervenir, comme elle l’a fait le 13 juillet 1933, pour entraîner de force ou contraindre les proches d’un accusé à une responsabilité collective. Mais je te le demande, es-tu vraiment sûr que notre « société à la mode » n’a plus rien à voir avec la responsabilité collective ?

Il faut comprendre que tous les cas de responsabilités collective de l’histoire humaine n’étaient rien comparées à celles que nous subissons aujourd’hui quotidiennement dans tous les domaines de notre vie. Et ce, curieusement, sans que la majorité des gens ne se rendent compte de ce qui se passe.

Mais tout d’abord, je dois encore une fois élargir un peu plus ton regard habituel, ton champ de vision, pour que tu n’associes pas seulement par réflexe le terme de responsabilité collective à des scénarios comme celui de novembre 1939. La responsabilité collective ne se limite pas, comme après l’attentat raté contre Adolf Hitler, à l’arrestation par la Gestapo de toute la famille d’Elser, l’auteur avoué de l’attentat. Ou comme au printemps 1945, où douze membres de la famille de Stauffenberg et un groupe d’une centaine de prisonniers ont été rassemblés au camp de concentration de Buchenwald. Nous ne faisons pas non plus le lien aujourd’hui avec juillet 2002, lorsque la Cour suprême israélienne a donné son feu vert à l’enlèvement de membres de la famille de terroristes présumés, afin qu’ils soient déportés de Cisjordanie vers la bande de Gaza en tant que boucliers humains.

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